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lundi 27 août 2018

Sarria – Portomarin





            Jeudi 18 septembre 2014 :  Sarria – Portomarin :  22.6 km


    Je me réveille ce matin avec un bon mal de tête. Pas besoin d’en chercher longtemps l’origine. C’est à coup sûr le vino tinto de la veille. Dricks nous avait confié l’avoir payé un euro la bouteille : il est certain qu’à un tel prix on ne pouvait pas espérer un grand cru ! Un peu de paracétamol et ce sera vite oublié.
    Le jour est à peine levé lorsque nous reprenons le chemin. En quittant la ville, nous sommes dépassés par une horde de pèlerins ; tous marchent d’un bon pas, il y en a de tous les âges, mais beaucoup n’ont pas la trentaine. Après quelques instants de réflexion, je comprends ce qui se passe. Sarria, que nous quittons, est situé à une centaine de kilomètres de Santiago. Or cent kilomètres représentent la distance minimale que doit parcourir un pèlerin à pied pour prétendre à la Compostella, ce certificat qui atteste que vous avez accompli le pèlerinage. Pour un Espagnol, une Compostella, c’est précieux, car c’est une ligne sur son Curriculum vitae, un plus pour obtenir un job. Quand on sait le taux de chômage qu’il y a dans ce pays, on comprend mieux pourquoi chaque jour tant de pèlerins prennent le Camino à Sarria. Plus loin un groupe d’une trentaine de jeunes me demande de faire la photo pour eux, je m’y plie volontiers.
   Aujourd’hui, nous ne rencontrerons pas les amis canadiens. Leur responsable, que nous avions vu à la sortie de la messe à Triacastela, nous avait alors expliqué que le groupe faisait une halte d’une journée à Sarria. Ce qui signifie que l’on se décale de leur plan de marche et que nous ne les reverrons peut-être plus. C’est bien dommage car nous avions sympathisé et le courant passait bien entre nous. Mais qui sait, peut-être les croiserons-nous à Santiago, le Camino réserve toujours des surprises quand il ne fait pas des miracles.
   Nous quittons la ville en traversant le Rio Celeiro sur un pont roman à deux arches. Plus loin, ce sera sur des « corredoiras » que nous éviterons de nous mouiller les pieds. Il s’agit de constructions typiques de la Galice ; un aménagement permet au ruisseau de prendre la chaussée pour lit, tout en préservant un corridor pour les pèlerins qui peuvent ainsi passer à pied sec. Nous en rencontrerons plusieurs dans les étapes à venir et pour franchir certains de ces ouvrages  mieux vaut avoir le sens de l’équilibre.
   Vers midi, une petite bruine nous contraint à passer les capes. Il faut dire que la Galice est en quelque sorte la Bretagne de l’Espagne : par la météo fortement influencée par l’océan, par les paysages, par les gens, par la gastronomie et également par la culture héritée des peuples celtes qui à une autre époque ont colonisé toute la façade ouest de l’Europe.
    Maintenant nous y sommes, nous venons de passer la borne indiquant que nous nous situons très précisément à 100 kilomètres de notre but. Photo bien évidemment avec un petit moment d’émotion à la clé.
   En milieu d’après-midi, nous découvrons au loin Portomarin. Une ville faite de maisons blanches au toit d’ardoises, toutes blotties contre le flanc de la vallée.  Il faut dire que cette ville a une histoire particulière. En 1962 la cité a été volontairement noyée par un barrage, un peu à la manière de Vouglans dans le Jura. Les monuments importants furent démontés pierre par pierre et reconstruits sur les hauteurs, au centre de la ville nouvelle. En période de basses eaux, apparaissent encore dans le fond du lac quelques reliquats de constructions, dont la pile d’un pont roman de 1120.
  Pour parvenir au centre, il nous faut descendre dans la vallée par un chemin caillouteux, puis  emprunter un long pont qui enjambe le fleuve (bonjour le vertige !), et  enfin, gravir des ruelles très pentues qui conduisent à l’église. Une étape au final pas si facile et  qui forcément va  laisser quelques séquelles sur le plan physique. Pour la première fois de l’année, Marie-Jeanne retrouve ses douleurs aux genoux. Ouille, ouille, ouille ! Nous faisons un crochet par l’office du tourisme. Elle se renseigne sur les horaires de bus et moi je profite de ce que l’hôtesse est sympathique pour lui demander de nous réserver notre hôtel à Santiago. Finalement c’est bien joué, car pourtant habituée à ce genre de demande, elle a beaucoup de mal à nous dénicher un hébergement.
    La douche prise, nous partons à la découverte de la ville. Nous consacrons l’essentiel du temps à la visite de l’église romane San Juan devenue San Nicolas. Un édifice impressionnant, qui revêt davantage l’allure d’une forteresse que celle d’un lieu de culte. Bâtie au 12e siècle, elle a appartenu à l’ordre de Saint-Jean de Jérusalem. Elle fait partie de ces constructions, qui lors de la création du barrage, ont été démontées et reconstruites pierre par pierre sur les hauteurs.

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