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dimanche 26 août 2018

Ponferrada – Villafranca del Bierzo





Samedi 13 septembre 2014 :  Ponferrada – Villafranca del Bierzo: 25 km


   L’étape du jour se situe en plein cœur du Bierzo, une région de vignobles qui produit  le Berciano, un vin que peut trouver excellent celui qui n’a pas encore dégusté les Rioja. Néanmoins, il va falloir s’y habituer, car sur les quelques étapes à venir, ce sera Bierzo ou Bierzo. Le soleil domine au départ mais la pluie est annoncée pour l’après-midi.  Nous prions Saint-Jacques pour qu’elle attende que nous soyons parvenus à Villafranca.
   À la sortie de la ville nous contournons Columbrianos, connu pour avoir accueilli dans un autre temps les légions romaines et découvrons un peu plus loin la petite église du quartier de Teso, accolée à son cimetière. À l’entrée, une scène assez nouvelle pour nous, mais que nous retrouverons désormais fréquemment sur le reste de notre périple. Il s’agit de bénévoles qui ont installé devant la porte une petite table avec les instruments nécessaires pour tamponner notre crédential. Ils n’ont pas oublié, bien évidemment, la petite boîte marquée « donativo », pour recevoir nos dons. Par habitude, avant d’apposer le timbre, le sello, nous nous assurons que le motif est de qualité sur le plan artistique, qu’il est original, et surtout, que par sa taille il ne va pas empiéter sur plusieurs cases. En effet, parvenant  au terme du Chemin, il est important de  gérer les emplacements encore disponibles. Quelques jours auparavant  je m’étais livré à un rapide calcul arrivant à la conclusion que je pouvais me permettre deux sellos par jour sans risque de débordement. Je vais donc me tenir à cette règle.
   Nous visitons la petite église. Sur son parvis, un haut poteau soutient un nid de cigogne.  À quelques pas de là, un vieil homme est installé devant sa maison avec tout un outillage lui permettant de sculpter des objets en bois. Il s’agit essentiellement d’ustensiles de cuisine : cuillères, fourchettes… Il est tellement absorbé par son travail qu’il n’a même pas remarqué ce pauvre pèlerin qui s’est arrêté à sa hauteur et qui pendant de longues minutes a observé ses gestes, admiratif de son savoir-faire et de la passion qu’il met dans son travail.
   La vallée du Bierzo, ce sont les vignes mais pas seulement, ce sont aussi des cultures et des vergers. Ici nous longeons un champ de potirons. Les légumes impressionnent par leur taille, certainement le double de ceux de nos régions, et par leur couleur, davantage sur le vert et le blanc que sur l’orange. En fait pas du tout  l’image du potiron que l’on utilise chez nous pour Halloween !  Mais finalement, peu importe la forme et la couleur, l’essentiel est que la soupe soit bonne.
   Après Camponaraya et jusqu’à Villafranca del Bierzo, les vignes occupent l’ensemble des terres cultivables. Nous sommes dans la zone d’appellation Bierzo qui regroupe 22 communes. On y produit essentiellement des rouges à partir de cépage Mencia, mais aussi quelques blancs sur le cépage Palomino. La période des vendanges a débuté depuis quelques jours et nous constatons une grande activité sur le terrain. Sur la route et en bordure de notre chemin, ce sont des va-et-vient incessants de tracteurs avec leur remorque conduisant la récolte à la coopérative voisine.
   À la sortie de Cacabelos, nous empruntons une route qui grimpe fortement en direction de Pieros. Assez à l’aise dans les montées, je dépasse quelques marcheurs qui sont à la peine, dont deux jeunes filles coréennes. Comme beaucoup de leurs compatriotes et plus généralement de pèlerins originaires d’Asie, elles sont couvertes de la tête aux pieds, portent gants, chapeau, et écharpe, pour dissimuler la moindre parcelle de leur corps. Leur grande hantise est effectivement le bronzage. Cela   paraît un peu ahurissant quand on pense que chez nous, les filles du même âge paient pour obtenir le contraire !
   À partir de Pieros, deux tracés coexistent pour rejoindre Villafranca : un chemin « officiel », proche de la route, et une variante qui présente l’inconvénient d’être plus longue de deux kilomètres mais le grand avantage de serpenter au milieu des vignes, bien loin de la circulation. Comme beaucoup de pèlerins, nous choisissons ce tracé et nous ne le regretterons pas.
La porte du pardon
   Ce matin, à observer le ciel, nous avons craint pour la météo, mais finalement le soleil s’est imposé toute la journée et le beau temps va nous accompagner jusqu’à Villafranca del Bierzo. À l’entrée de la cité, nous découvrons l’Église de Santiago, un édifice imposant, qui fait penser davantage à une forteresse qu’à une église.  Sur son côté, un portail à multiples voussures permet l’accès à l’édifice : la Porte du Pardon. Pour comprendre cette appellation, il faut savoir qu’au-delà de cette ville, le pèlerin doit fournir des efforts particuliers pour gravir les collines qui le séparent encore de Santiago et notamment le O Cebreiro qui culmine à 1400 mètres. Certains jacquets, compte tenu de leur santé ou de leur état de fatigue, ne pouvaient pas poursuivre plus loin et se trouvaient contraints de mettre fin ici à leur pérégrination. Il fut alors attribué à ce portail un pouvoir spirituel particulier. Celui d’offrir à ces  pèlerins, qui y apposeraient leurs mains, les mêmes grâces qu’ils auraient pu obtenir  en allant jusqu’au tombeau de l’apôtre. Le repêchage en quelque sorte !
   Après quelques difficultés, et avec l’aide de l’office du tourisme, nous parvenons enfin à localiser notre gîte. Il se trouve un peu à l’écart du centre, en bordure du Rio. Nous le rejoignons et accomplissons les formalités d’usage d’une fin d’étape : installation dans les chambres, règlement de notre hébergeuse, sello sur la crédencial et douche. Avant le repas nous prenons le temps de découvrir la ville, le château des Marquis, la collégiale Santa Maria de Cluniaco, et les places du centre-ville où règne une ambiance bien agréable de fin de journée. C’est là que nous dînons.  Je tente une spécialité culinaire de la région: le « lacon con grelos », (jambonneau de porc aux feuilles de navets) accompagné d’un Berciano comme il se doit. Ce soir il y a fête dans la ville  mais nous n’attendrons pas que soit tiré  le feu d’artifice pour nous coucher.              

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