Mardi 13 septembre 2011 : Livinhac-le-haut - Figeac : 25 km
Ce
soir en arrivant à Figeac nous aurons atteint notre premier objectif et au
moment de m’engager sur cette dernière étape, dans mon esprit les sentiments se
contrarient un peu : je ressens d’un côté une grande satisfaction d’avoir
réussi ce défi, moi qui ignorait tout de l’univers de la randonnée, allant
jusqu’à douter de ma condition physique, et en même temps j’éprouve une
certaine tristesse à l’idée de quitter
ce soir, brutalement, sans transition, ce Chemin qui m’a procuré tant de joie
et de surcroit devoir patienter une année avant de le retrouver.
Ces
instants d’émotion dissipés, nous nous engageons sur cette ultime étape. Un
parcours de 25 kilomètres qui nous fait
traverser Montredon puis nous conduit à Saint-Félix. Nous y visitons l’église
romane dédiée à Sainte Radegonde et dont le tympan représente Adam et Ève
devant l’arbre et le serpent.
À Figeac nous logeons chez « Célia », une
demeure ancienne, en plein centre-ville, dont le propriétaire a engagé de
lourds travaux de réfection. Le rez-de-chaussée et le premier niveau ont été complètement
restaurés et aménagés avec goût. Le 2e étage, où notre hôte nous a
installés, est encore en cours d’aménagement et les équipements paraissent
encore bien rudimentaires. Lorsque je lui demande la clé de la chambre, il me
tend un bout de carton plié en quatre, m’expliquant que la serrure a été forcée
dernièrement, et que ça fera très bien l’affaire pour tenir la porte fermée. J’en
ris, sans m’en offusquer, lui répliquant que les pauvres pèlerins que nous
sommes n’ont pas grand butin à voler.
Nous sommes à deux pas de la place Champollion, une
place comme je les aime, avec des bistrots, des restaurants, des terrasses animées et ce soir une luminosité toute particulière créée
par les derniers rayons de soleil qui éclairent les façades des maisons. Nous
nous installons à une table car c’est l’heure de la Leff, un des moments de la
journée que l’on apprécie le plus car pour nous il est synonyme de repos et de
convivialité. Comme chaque fois on fait le débriefing de l’étape, nous remémorant les difficultés,
les rencontres, les visites, les anecdotes, on consulte le topoguide, le
Miam-miam dodo, pour voir ce que nous réserve la marche du lendemain en terme
de distance et de dénivelé. C’est là que
souvent nous rencontrons des connaissances avec lesquelles nous partageons ces instants
de tranquillité. Ce soir nous retrouvons Claude et Patrick ; après
Conques, ils ont emprunté une variante du Chemin qui passe par Decazeville.
Patrick nous raconte sa nuit agitée dans le gîte précèdent où il s’est fait
dévorer par des punaises de lit. Il nous montre tout cela, un cordon de piqûres
rouges s’étend sur tous ses membres, c’est impressionnant ! À voir
les dégâts on comprend mieux pourquoi certains hébergeurs prennent tant de
précautions vis-à-vis de ces bestioles ! Nous rencontrons également une
Suissesse, dont j’ai oublié le prénom, qui a débuté au Puy en même temps que
nous et que nous avons vue ensuite à plusieurs reprises sur le Chemin. Ce soir,
en visitant la ville, contemplant certainement davantage les toits et les façades
des vieilles demeures que le sol, elle a raté une marche d’escalier et s’est
fait ce qui ressemble fortement à une entorse. C’est incroyable, après avoir
parcouru des centaines de kilomètres sur des sentiers caillouteux, où il ne
faut surtout pas quitter ses pieds des yeux sous peine de risquer la chute, c’est ici qu’elle se blesse,
en pleine ville, dans un lieu où pourtant
tout est fait pour sécuriser les piétons. C’est vraiment pas de chance !
Une journée d’éclopés !
Le
départ vers Le Puy est prévu pour demain après-midi. Nous disposerons donc de
la matinée pour approfondir notre visite de Figeac, l’église Saint-Sauveur,
sans oublier la Place des Écritures où est reproduite au sol, la célèbre Pierre
de Rosette qui a permis à Jean-François
Champollion (enfant du pays) d’élucider le mystère des hiéroglyphes Égyptiens.
La pierre de Rosette |
C’est ici que s’achève notre parcours 2011 ; 250
kilomètres qui nous ont conduits du Puy-en-Velay à Figeac. Un parcours
initiatique qui m’a fait découvrir « le Chemin » dans toutes ses
dimensions : l’effort physique,
les rapports avec les autres, l’abandon du superflu au profit de
l’essentiel, une leçon de vie, des
moments inoubliables. Au départ du Puy, je n’avais qu’une vague idée de ce que
représentait ce périple, elle n’était que
le fruit de mon imagination et laissait sans réponse nombre de
questions : serait-ce à ma portée ? ce quotidien répétitif ne
sera-t-il pas trop ennuyeux ? La dose de religiosité à laquelle je vais
être soumis sera-t-elle supportable ? Toutes des interrogations qui ne
peuvent trouver une réponse qu’à l’épreuve du terrain. Et ici, après cette
quinzaine d’étapes, je suis pleinement rassuré : le doute et l’appréhension ont laissé la place à l’envie de poursuivre,
d’aller au bout.
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