Jeudi 19 septembre 2013 : Hornillos del
Camino - Castrojeriz : 19,7
km
Départ au petit
matin, le ciel est encore rougeoyant, super, j’adore prendre des photos de
lever et coucher de soleil.
Nous rencontrons
beaucoup de cyclistes sur le chemin, en général des vététistes. C’est une
différence avec la France, qui trouve peut-être son explication dans le fait
qu’ici, en Espagne, le chemin est très roulant contrairement à chez nous où il
s’agit plutôt de sentiers étroits, beaucoup mieux adaptés aux marcheurs qu’aux cyclistes. Ils
roulent le plus souvent en groupe de deux ou trois, et, pris dans nos pensées,
nous sommes souvent surpris lorsqu’ils nous dépassent. Les rapports avec eux
sont toujours cordiaux, nous nous échangeons un « buen Camino » et ils disparaissent.
Christelle et Jean-Patrick nous rattrapent, je
prends une magnifique photo d’eux en contre-jour, puis nous cheminons ensemble.
À l’entrée d’Hontanas nous faisons la pause devant l’ermita de Santa Brigita,
puis visitons l’église du village. Nous avons de la chance, car nous y trouvons
le sacristain, un homme d’un certain âge, qui aime bien s’entretenir avec les pèlerins.
Il le fait en espagnol, mais ce n’est pas un problème pour nous, Christelle fait la traduction en
live, merci Christelle. Il nous parle d’une grave maladie qui a sévi dans la
région au 11e siècle que l’on appelait alors « Mal des
ardents » et qui était causée par l’ergot du seigle. La maladie pouvait
revêtir plusieurs formes : convulsions, hallucinations et gangrène et
frappait surtout les pèlerins, car les habitants de la région, habitués depuis
des générations à consommer le pain de Hontanas, étaient en quelque sorte immunisés. Les hospitaliers Antonins
s’étaient fait une spécialité de soigner cette maladie. Légende ou fait réel ?
Pour ma part, je penche pour la deuxième
hypothèse tant le récit du vieillard est convaincant. Il nous dit également
avoir fait quatre fois le Camino, et, poursuivant les confidences, nous avoue que sur ce chemin,
il y a quelque chose d’indéfinissable. Je ne suis qu’à mon premier Camino mais
je pense avoir déjà ressenti, au moins pour partie, cet
« indéfinissable » dont il nous parle. Nous le quittons sur un
« muchas gracias », et
reprenons notre route.
Ni le temps ni le décor n’ont changé depuis
hier, il fait encore très beau, sans que la chaleur soit excessive, et nous sommes toujours à
pérégriner dans ces paysages merveilleux que nous offre la Meseta. À cette
saison de l’année les céréales ont été récoltées depuis plusieurs semaines, les
champs ont été labourés et préparés pour les prochaines semailles, et c’est
donc un dégradé de brun, de beige, de marron que nous avons devant les yeux.
Parfois un champ de tournesols en fleur rompt cette monotonie et apporte au
tableau sa touche de verdure et de fraîcheur. Des pèlerins se sont amusés à
donner à certaines fleurs des représentations de visages affichant de larges
sourires : un clin d’œil de la nature à ceux qui arpentent le chemin.
L’art n’a vraiment pas de limite, tous les supports sont bons pour exprimer et
traduire ses idées du moment !
Peu avant le terme
de notre étape, nous passons sous la voûte du couvent de San Anton où au moyen
âge les moines distribuaient les repas
aux pèlerins. Aujourd’hui il ne faut pas compter sur ce lieu pour se restaurer,
il n’y a que des ruines et plus de moines. À l’arrière subsiste un gîte pouvant
accueillir une vingtaine de pèlerins et tenu par les Quakers américains.
À 13 heures
Castrojeriz apparaît, reconnaissable de très loin par la butte qui surplombe la
ville avec le château à son sommet, une configuration qui ressemble un peu au
site de Villamayor de Monjardin. Encore un de ces lieux d’Espagne qui a dû connaître des temps forts
au moment de la Reconquista. Il nous faut marcher encore plusieurs kilomètres
en bordure de route pour rejoindre le bourg qui, à mesure que l’on s’en
rapproche, nous apparaît comme coupé en deux : sur la droite un
hameau avec l’église Nuestra Senora del Manzano et plus à gauche le reste de la
ville, plus imposant. C’est dans cette partie que nous avons réservé notre
hébergement.
Après un petit
encas au restaurant de la place, nous rejoignons notre gîte. C’est une vieille
demeure, entièrement rénovée, dans laquelle il règne une odeur d’insecticide,
insupportable tellement elle est forte. Certainement que notre hôte, pour notre
bien, a voulu se débarrasser des mouches, car il faut dire que depuis quelques
étapes, elles sont omniprésentes, dans les villes, les restaurants, et même en
pleine campagne. Dès que nous entrons
dans la chambre, nous aérons, car comme on dit, entre deux maux, il faut
choisir le moindre. Les pièces sont propres, spacieuses, et décorées avec goût.
Le patron est un homme qui affiche la soixantaine, pas moins, il nous paraît
plutôt Anglais qu’Espagnol. La scène que nous vivons maintenant est assez
insolite : l’homme ne parle pas, ouvre son ordinateur portable, un
Apple dernier cri, et sans nous regarder, tapote sur le clavier pendant de
longues minutes. Que fait-il, sa comptabilité, gère ses réservations... ?
Rien de tout cela. Nous comprenons
lorsqu’il tourne l’écran en notre direction. Il était en train de rédiger, dans
sa langue, un mot d’accueil à notre intention
et l’a fait traduire par l’ordinateur. Il y explique le fonctionnement
de la maison, les horaires, les clés, le petit déjeuner, et précise également
qu’il s’appelle Walter et sa femme (que nous n’aurons pas le plaisir de voir),
Sharon.
Nous profitons de
l’après-midi pour visiter le village construit sur les flancs de la colline.
Beaucoup de maisons apparaissent délabrées ou même en ruine, un peu à l’image
du château qui domine la colline. Christelle et Jean-Patrick nous ont quittés,
ils ont souhaité aller un peu plus loin aujourd’hui pour raccourcir d’autant
l’étape de demain. Dîner avec menu pèlerin et ce soir je troque l’ensalada
contre une soupe à l’ail, une spécialité de la région. Un vrai délice !
Soupe à l'ail |
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