Samedi 21 septembre 2013 : Frômista - Carrion de los Condes :
20,8 km
Avant de nous
mettre en route, nous prenons le desayuno avec Christelle et Jean-Patrick dans
une boulangerie à proximité de notre
hébergement. Ce matin nous bénéficions
encore d’un magnifique lever de soleil qui donne un bel éclat ocre à la façade
de l’église San Pedro. L’étape n’est pas très longue mais réputée éprouvante,
car le chemin ne décolle pas de la route nationale. Pour l’éviter sur une
partie du parcours, nous empruntons une variante qui longe le Rio et qui
aujourd’hui est parfaitement balisée. Nous parvenons à Villalcazar de Sirga et
découvrons l’église des templiers Santa Maria la Blanca, à la fois cathédrale
et forteresse, possédant à l’intérieur un puits qui permettait aux habitants de soutenir les
sièges. Elle abrite les tombeaux de l’infant Don Félipe, frère du roi de
Castille, et à côté, celui de sa dernière épouse, Léonor de Castro. La localité
tient sa notoriété à sa Vierge blanche ; de nombreux miracles furent attribués à cette
sainte par les pèlerins et une statue la
représentant trône au centre du retable de l’église.
Après Villalcazar,
il faut longer la route, une route rectiligne qui n’en finit pas. Enfin Carrion
de los Condes apparaît. C’est une ville de 2.000 habitants possédant quelques
richesses architecturales, dont le couvent de Santa Clara dans lequel vivent
des clarisses cloîtrées, l’église de Santiago, sans oublier l’église Santa
Maria de la Victoria. Au fronton du portail de cette dernière, une frise
évoquant la légende des 100 vierges.
Cent
vierges devaient être livrées au calife de Cordoue : 4 devaient
être données par Carrion de los Condes. En l’an 826, les envoyés du calife
venaient en prendre livraison devant les portes de la ville. Les demoiselles
demandèrent alors à la Vierge de les sauver. La Vierge apparut aux yeux des
jeunes filles ainsi qu’à 4 taureaux qui paissaient tout près de là. Ceux-ci
rendus furieux par cette apparition chargèrent les envoyés du calife qui ne
revinrent jamais.
Sur la place du
village se dresse une statue en bronze représentant un pèlerin à table après sa
journée de marche. Christelle s’assied à côté de lui, et pour la photo, mime le
pèlerin abattu, épuisé au terme d’une étape harassante. Elle fait très bien cela,
elle n’a pas besoin de forcer son
talent, c’est naturel chez elle. Elle accompagne souvent ses échanges avec les
autres de mimiques qui traduisent à la perfection ses sentiments et ses
émotions de l’instant : de
l’étonnement, de la colère (rarement), de la fatigue, de la douleur, de la
déception … Est-ce la conséquence de sa formation de comédienne ou l’inverse ?
Peu importe qui de l’œuf ou de la poule,
ce qui est sûr c’est que ça lui va très bien. Christelle surtout ne change
rien !
Le soir à 19 heures,
nous assistons à la messe dans l’Église Santa Maria : deux prêtres
officient, entourés de plusieurs sœurs Clarisses. À l’issue de la cérémonie,
ils invitent les pèlerins à se rapprocher de l’autel pour recevoir la
bénédiction. L’un des prêtres fait l’accueil dans 2 ou 3 langues différentes,
puis, énumérant les différents pays du monde, cherche à connaître l’origine de
chacun de nous. Il y a là plus de 20 patries représentées, des gens
certainement de différentes confessions, des croyants, probablement en
majorité, mais peut-être des athées, mais peu importe, tous semblent unis dans
une même ferveur que le prêtre a su créer, encore la magie du chemin,
l’indéfinissable dont parlait le sacristain d’Hontanas. Enfin c’est le moment
de la bénédiction, un moment solennel et plein d’émotion lorsque le prêtre
impose les mains sur le front de chacun de nous en faisant le signe de la
croix. Une sœur à ses côtés nous tend un panier empli d’étoiles en papier,
toutes colorées différemment. Un présent sans grande valeur matérielle si ce
n’est celle d’un centimètre carré de
papier, mais d’une grande valeur spirituelle. J’en choisis une, que je
glisserai ensuite dans mon portefeuille et qui me rappellera cet autre grand
moment du Camino.
Sur le parvis, Jean-Patrick
nous présente l’une de ses connaissances : Youri, un pèlerin russe de Saint-Pétersbourg qui
était ingénieur dans les sous-marins et qui un jour, a tout plaqué pour se
consacrer à une étude comparative des différentes religions. Drôle de
chemin !
Puis arrive l’heure
du dîner. Ce soir je tente de nouveau la soupe à l’ail mais celle-ci ne vaut
pas la précédente, la prochaine fois je reviendrai à l’ensalada.
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