Mercredi
25 septembre 2013 : El Burgo de Ranero - Mansilla de las Mulas : 18.7
km
L’étape du jour est
du même acabit que la précédente : même plaine, même sentier pour les
marcheurs, même route à droite pour les cyclistes. Rien à regarder, rien à
admirer, alors je réfléchis, je réfléchis au chemin, essaie de trouver des
phrases qui le caractérisent, trouve
même des rimes qui sonnent bien et
voilà comment, portable en main, je commence à rédiger un petit poème
sur le Camino. Je ne suis pas expert dans cet art, loin s’en faut, mais
pourtant les vers arrivent naturellement, les rimes me semblent aisées à
trouver. Est-ce l’effet Saint-Jacques ? Au fur et à mesure de l’avancement,
je fais partager le résultat à Gaby et Marie-Jeanne. Je peaufinerai mon travail
sur l’étape de demain et le soir au dîner, non sans une certaine fierté, je livre ce poème à mes amis :
El CAMINO
Toi
que dans ton pays on nomme Camino,
Toi
qui guide le jacquet jusqu'à Santiago,
Du haut de la Navarre pour finir en Corogne
Bien loin de ma terre qui s'appelle Bourgogne,
Tu as vu dans l'histoire, peu après le Messie,
Se battre des hommes
au péril de leur vie.
Ils chassèrent de ton
sol ces odieux conquérants
Qui partis de Córdoba
ont au fil des ans
Envahi ta contrée et même plus
encore,
Asservi le peuple, et
fait tant et tant de morts.
Le bon roi Charlemagne et son neveu Roland,
Ont sacrifié les vies
de leurs preux combattants.
Par la reconquista, les valeureux chrétiens
Ont fini de chasser Maures et sarrasins.
Templiers, hospitaliers, chevaliers de Malte,
Très nombreux ils furent à y avoir fait halte
Pour qu'enfin ce chemin redevienne le nôtre
Et nous ouvre la route
qui conduit à l'apôtre.
L’écriture d’un
poème ne m’extrait pas totalement de la réalité du chemin. Dans un message, Christelle
avait recommandé à Marie-Jeanne de ne pas manquer le bar de Religios qui est
remarquable par son originalité. Nous
suivons ses conseils et faisons le petit détour pour le découvrir. C’est une
maison dont les murs extérieurs sont entièrement couverts de tags, et y
pénétrant, nous remarquons que c’est la même chose sur les murs intérieurs. Ce
bar, avec son petit air de Bagdad café,
a une histoire, dans ce sens qu’il apparaît, assez furtivement certes, dans le
film « the Way ». Quelques clients consomment dont un couple d’Australiens
avec lesquels nous échangeons quelques mots. Le patron se tient derrière le
zinc et attend que nous lui passions notre commande. C’est Marie-Jeanne qui le
fait, ce sera trois verres de vino blanco. Le patron, qui paraît alors assez
étonné, nous confie que le matin il a plutôt l’habitude de servir des petits
noirs que des petits blancs. Qu’à cela ne tienne ! Tout en dégustant mon
verre de blanc, j’essaie de déchiffrer
et traduire les tags du mur : toutes
les langues sont représentées, le pilier, lui, semble réservé aux pèlerins
chinois. Des commentaires banals, mais d’autres, plus profonds. Je lis ici
l’extrait d’une citation de
Saint-Exupéry : « l’essentiel
est invisible pour les yeux », plus loin « il suffit de regarder au-delà de l’horizon
du chemin » ou encore « si
vous ne pouvez pas être avec la personne que vous aimez, aimez la personne qui
est avec vous ». Je prends quelques photos de tous ces graffitis, me
disant qu’à mon retour j’aurai le temps d’analyser tout cela et que j’y
trouverai certainement quelques réflexions philosophiques intéressantes.
Nous parvenons à
Mansilla en tout début d’après-midi. L’hôtel est très correct mais l’accueil
est on ne peut plus détestable. Ce soir, c’est décidé, nous ne dînerons pas là,
nous chercherons un autre restaurant.
Mansilla est une ville forte dont
une grande partie des fortifications est encore visible. À l’intérieur du bourg
une multitude de petites places, entourées d’arcades de bois, témoignent de son
passé et en font son originalité.
Nous prenons le
dîner dans un petit restaurant tenu par un Anglais et sympathisons avec les clients de la table
voisine, deux couples de
Belges pleins d’humour. Ils font le Chemin à raison d’une semaine par an : c’est
ainsi qu’ils ont réalisé le parcours français en six ans. Durant ces années,
ils en ont profité pour apprendre l’espagnol et aujourd’hui ils le parlent
couramment. Je les admire, apprendre et pratiquer six ans après, je ne suis pas
certain que j’aurais eu la patience. Bravo les gars !
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