Mercredi
5 septembre 2012 : Cajarc – Limogne en Quercy :
18 km
Ce matin nous entamons notre troisième étape et je commence à retrouver
les sensations du Chemin. C’est bon
signe ! Il faut toujours 2 à 3 jours pour faire le vide, s’extraire des
trépidations de notre quotidien. Ici
nous n’avons rien à penser, rien de majeur dont nous devons nous préoccuper, le
Chemin nous libère de toutes les contraintes : Il n’y a pas de voiture qui ne démarre pas, de
rendez-vous pour lequel nous aurons du retard, pas de réunion à une heure
indue, pas de responsabilité, pas de chef… Le principal souci concerne l’état
de nos pieds et leur capacité à enchaîner les étapes et sur ce plan, pour
l’instant, c’est plutôt pas mal. Mais pour ma part, je pense néanmoins que
l’absence de douleur ne suffit pas à faire de moi un jacquet heureux ; il
reste un mal à combattre : la solitude. Je n’imagine pas pérégriner seul,
j’ai besoin de rencontres, de ces moments d’échanges et de partage avec les
autres, de ces instants de convivialité qui font l’ambiance du Chemin, une
ambiance que seuls peuvent découvrir ceux qui sont dessus. Un ancien pèlerin me
disait que pour retrouver les plaisirs qu’il avait connus, il avait refait
quelques étapes en voiture, s’arrêtant le soir dans les gîtes dont il avait
gardé de bons souvenirs. Il pensait alors qu’en partageant le dîner avec ceux qui faisaient étape ici, suffirait
à lui faire redécouvrir, pour un soir, les sensations et les joies du pèlerinage
telles qu’il les avait vécues. Il me confiait alors s’être trompé et avoir
compris après coup que, pour vivre pleinement le Chemin, il faut être sur le Chemin,
il faut avoir une histoire commune avec ceux qui dînent avec vous, avoir admiré les mêmes paysages, découvert
les mêmes villages, vu peut être les mêmes personnes, avoir rencontré les mêmes
difficultés tout au long de la journée. Pour ma part je ne suis pas étonné de
sa remarque et je ne suis pas tenté de faire le même exercice que lui. On ne
peut pas vivre le Chemin en pointillé, le Chemin c’est un trait plein, un trait
continu !
Après ces réflexions, revenons
au chemin, celui qu’il faut arpenter pour avancer. Au départ, il se confond
avec la route et il nous faut marcher plusieurs kilomètres sur le bitume,
jusqu’à atteindre Gaillac. Il ne s’agit pas du Gaillac situé un peu plus au sud
et réputé pour ses vins, mais d’un tout petit hameau en surplomb du Lot. En
parcourant son unique ruelle, dont la longueur ne dépasse pas une centaine de
mètres, nous découvrons de chaque côté quelques vieilles demeures dont le fleurissement est remarquable. Puis, poursuivant
notre marche nous nous élevons doucement au-dessus de la vallée. À mesure que
l’on progresse, les cultures se raréfient. Un sentier bordé de buis et de murs de
pierres sèches nous permet d’atteindre le plateau. Nous faisons quelques pas à l'écart du GR pour
visiter Saint-Jean-de-Laur. Nous y déjeunons sous un tilleul, devant la mairie.
Tout en dégustant notre sandwich nous prenons le temps d’observer les lieux. C'est
un village qui ressemble à bien d’autres sur ces terres du Quercy où nous ne
rencontrons aucune âme, comme si une guerre nucléaire avait d’un coup
anéanti toute vie. À regarder de plus près, nous constatons néanmoins que
beaucoup de demeures ont été joliment rénovées
ou sont en cours de restauration. Il s’agit probablement de résidences
secondaires pour les habitants des villes situées à proximité comme Cajarc ou
Cahors. Nous voilà rassurés !
Nous reprenons notre marche, après avoir visité la petite église du
village. Un peu plus loin, sur un amas de pierres surmonté d’une croix, comme
on en rencontre beaucoup sur le Chemin, je dépose celle qu’Achille, mon
petit-fils, m’a donnée à mon départ. Voilà,
c’est fait, j’espère que mes vœux seront exaucés !
Ce soir nous sommes hébergés au gîte des Gloriettes. Il s’agit d’une
vaste et belle demeure tenue par Marie, une Belge, qui, il y a quelques années,
rentrant de Compostelle, a décidé
d’acquérir cette propriété et de la destiner à l’accueil des pèlerins. Elle
a choisi de mettre sa gentillesse et son courage au service des autres : une
démarche qui mérite d’autant plus notre admiration qu’elle est seule pour gérer
l’ensemble des activités de ce grand établissement.
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Saint-Jean-de-Laur |
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Marie des Gloriettes |
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Les Gloriettes |
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