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dimanche 26 août 2018

Belorado - San Juan de Ortega





Dimanche 15 septembre 2013 :  Belorado -  San Juan de Ortega :   24,4 km


    Aujourd’hui c’est une étape de montagne qui nous attend. Nous devons franchir le col Alto  de Valbuena dans la Montes de Oca, à 1170 mètres d’altitude. Un sommet presque aussi haut que Roncevaux, mais qui n’en fait par pour autant une étape particulièrement difficile. Pour comprendre, il faut expliquer que nous partons de 770 mètres, ce qui signifie que nous n’avons que 400 mètres de dénivelé. Aguerris  que nous sommes, ce n’est pas la mer à boire ! Nous prenons le désayuno au gîte avant de nous mettre en route. À une table derrière moi, deux Anglais de Gibraltar font de même. Nous échangeons quelques mots.
    Le premier village que nous rencontrons est Tosentos, connu pour le sanctuaire de la Virgen de la Pena, creusé à même la montagne, à la façon des maisons  troglodytes. Avec Gaby nous faisons un petit détour pour prendre la photo de plus près, tandis que Marie-Jeanne poursuit son chemin.  Ce qui paraît, a priori, une bonne stratégie pour économiser un petit peu son genou se révèle être un bien mauvais choix, car elle se trompe de route et doit marcher un kilomètre supplémentaire pour nous rejoindre. Il y a vraiment des jours sans !
    Après avoir traversé Villambistia puis Espinosa del Camino nous parvenons à Villafranca. L’église Santiago est malheureusement fermée et nous ne pourrons donc pas admirer le bénitier en forme de coquille ainsi que les deux statues de Saint-Jacques, dont une avec un reliquaire aménagé dans la poitrine de l’apôtre. À la sortie de la ville les difficultés deviennent plus sérieuses, car d’un coup la pente s’accentue fortement. Nous rentrons dans un paysage de sous-bois, un décor que nous n’avions pas connu depuis l’étape de Zubiri. Il s’agit de la forêt d’Oca, réputée dans le passé pour ses loups et ses bandits de grands chemins. « Si quieres robar, véte a los Montes de Oca », dit  un dicton encore bien présent dans la mémoire des anciens du village, « Si tu veux voler, va-t’en aux Monts de Oca ». Mais ça, c’était le passé ! Aujourd’hui plus rien à craindre, même si j’ai lu qu’il y aurait encore quelques loups, mais qui fuiraient à la vue de l’homme. Nous resterons donc vigilants ! Le paysage est bien différent de ce que nous avons connu dans les étapes précédentes, mais tout aussi grandiose. Nous sommes entourés de bois, des jeunes chênes au début, puis de petits pins ensuite, avec au sol, de chaque côté, de la fougère, remplacée un peu plus loin, à mesure que l’on gravit la côte, par de magnifiques tapis de bruyères. Une pèlerine s’est même amusée à écrire un message avec des fleurs de bruyères. On peut lire en très gros caractères : « KEEP UP THE PACE », ce qui se traduit par : « gardez le rythme ». Plus facile à dire qu’à faire dans une côte qui n’en finit pas et dont la pente ne cesse de s’accentuer !
    Des textes anciens évoquent un miracle qui se serait produit dans les monts d’Oca en 1108.
    Un Français s'était marié dans l'espoir d'avoir des enfants. Comme il vivait dans le péché, ses espoirs s'avérèrent vains, aussi prit-il le chemin de Compostelle pour s'attirer les faveurs de l'apôtre.
    Devant son tombeau, il l'implora, le supplia et finit par obtenir ce pour quoi il avait fait le pèlerinage. De retour en France, il retrouva son épouse et, après un délai d'attente, celle-ci mit au monde un fils auquel ils donnèrent le nom de l'apôtre, Jacques.
   Lorsque l'enfant eut quinze ans, la famille partit pour Saint-Jacques. Mais arrivé dans les monts d’Oca, l'adolescent tomba malade et mourut. Folle de douleur, la mère s'adressa à saint Jacques : « Toi qui m'as donné cet enfant, rends-le-moi ! ». Et alors qu'on se préparait à lui donner une sépulture, le jeune homme se leva comme s'il sortait d’un long sommeil. Il raconta que l'apôtre, après avoir rendu son âme à son corps, lui avait demandé de repartir immédiatement pour Compostelle.

 

    Il est midi lorsqu’enfin nous atteignons le sommet du col de Pedraja. Une stèle commémorative de la guerre civile espagnole rappelle aux pèlerins qu’ici, furent fusillées quelque trois cents personnes par ceux qui ont soutenu le coup d’État du maréchal Franco. Très longtemps le gouvernement a mis un couvercle sur ces atrocités, mais depuis quelques années des fouilles ont été autorisées et ont permis de mettre au jour des fosses communes où avaient été jetées ces malheureuses victimes du fascisme. Tout  près, un jardin du souvenir  permet aux familles de se recueillir. Nous déjeunons à proximité, puis reprenons notre marche vers San Juan de Ortéga qui n’est distant que de cinq kilomètres. Nous y parvenons peu après 15 heures. C’est une minuscule localité avec de rares maisons et une auberge, construites autour d’un ensemble d’édifices religieux, œuvre de San Juan au  12e siècle. Le soir nous assistons à la messe qui s’achève par la traditionnelle bénédiction des pèlerins. Le dîner nous est servi au gîte sous forme d’un plateau-repas relativement copieux. C’est là que nous découvrons pour la première fois le boudin noir façon Castille. Celui-là était excellent, les suivants le seront moins.

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