Dimanche
21 septembre 2014 : Azuar – O Pedrouzo : 19.2
km
La nuit
m’a permis de me requinquer après la longue étape d’hier. Les amis sont
également en forme et ce matin nous repartons à trois pour notre avant-dernière
étape. Depuis plusieurs jours le beau temps nous accompagne et ce sera encore
le cas aujourd’hui. Au petit matin nous avons encore droit à un magnifique
spectacle que nous offre la nature, celui des brumes s'élevant doucement vers
le ciel, laissant peu à peu entrevoir au sol les champs et les forêts. Que
c’est beau !
Le compte à rebours sur les bornes ne cesse
de décroître, ici, peu avant Boavista, la borne affiche 30 kilomètres. Dans
plusieurs récits j'avais lu que les pèlerins, sur les dernières étapes, éprouvaient
le besoin de baisser la cadence pour faire durer le plaisir. L’un d’eux
écrivait : « j’ai
presqu’envie de ralentir le pas pour que jamais ce chemin ne finisse ». En
ce moment et pour la première fois, je ressens complètement ce désir de lever
le pied. Comment se l’expliquer ? Je pense que lorsque l’on s’élance sur
le chemin, le but, la satisfaction attendue, c’est son terme, l’arrivée sur la
place de l’Obradoiro, la Cathédrale de Santiago, l’apôtre Saint-Jacques. Alors
à ce moment, à l’instant du départ, pour le pèlerin, le chemin n’est qu’un
moyen d’atteindre ce but, un moyen
incontournable, un moyen qu’il redoute même, car semé d’embûches et de maintes difficultés.
Mais peu à peu, après tous ces kilomètres parcourus, ces moments de bonheur
qu’il lui procure, le moyen supplante le but. Et ici, parvenus au terme du
voyage, nous sommes en train de prendre conscience que dans un jour, deux jours
tout au plus, nous allons abandonner ce qui a fait notre bonheur pendant tant
de temps. La nostalgie du chemin est en
train de l’emporter sur la joie de l’aboutissement.
Laissons ces réflexions stériles de côté et
revenons au chemin, celui qu’il faut arpenter du matin au soir pour espérer
parvenir un jour au but. Car s’il procure beaucoup de moments de bonheur à
certains, pour d’autres il restera synonyme de galère. Disant cela, je pense
tout particulièrement à ces deux Nancéennes, Geneviève et Dominique, que nous nous apprêtons à dépasser, et avec
lesquelles nous échangeons quelques mots. Geneviève a eu 70 ans aujourd’hui. Sa
maladie de cœur les freine énormément dans leur progression. Elles ne peuvent
pas marcher plus de 10 kilomètres par jour. Toutes deux avaient prévu de fêter
cet anniversaire à Santiago et aujourd’hui elles réalisent que le pari est
perdu, perdu pour deux petits jours. On sent de la déception, beaucoup de déception.
Il y aura bien sûr la fête mais elle ne sera pas complète, ce sera sans les
bougies. C’est aussi cela le Camino !
En fin de matinée nous faisons halte dans un
bar pour reprendre quelques calories. La terrasse est bondée, néanmoins nous
réussissons à dénicher une table. Nous
retrouvons un couple de Canadiens, un autre, avec lequel nous avions sympathisé
dans une étape précédente. Elle se prénomme Claudine et lui Daniel. Claudine a
débuté le Camino à Roncevaux, lui à Léon car il est encore en activité. L’année
prochaine, ils envisagent d’effectuer la partie française. En amont de
Roncevaux nous avions déjà rencontré un couple de leurs compatriotes, Marc et
Mardi, qui après avoir découvert le chemin Espagne, étaient venus reprendre le
départ au Puy-en-Velay. Ce n’est vraiment pas aisé de quitter le chemin !
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